Pourquoi travailler l’assouplissement des jambes (même si vous n’êtes pas gymnaste)
Si vous faites du sport, vous avez déjà entendu cette phrase : « Il faut t’étirer ». En général, elle arrive après un entraînement, quand vous avez déjà la main sur la poignée de la porte du vestiaire. Résultat : trois mouvements bâclés et terminé.
Le problème, c’est que cette « négligence » de la mobilité finit par se payer cher : raideurs chroniques, douleurs aux genoux, tensions dans le bas du dos, blessures à répétition, perte de puissance. Oui, perte de puissance : un muscle raide, c’est un muscle qui travaille mal.
La bonne nouvelle : vous n’avez pas besoin de passer 45 minutes par jour en mode yoga avancé pour que ça change. Une routine simple, ciblée, 10 à 15 minutes, peut déjà transformer votre façon de bouger, de courir, de sauter… et de récupérer.
Dans cet article, je vous propose une routine d’assouplissement des jambes :
- Simple à comprendre
- Facile à intégrer dans votre semaine
- Orientée prévention des blessures, pas performances de contorsionniste
On va parler concret : quels exercices, combien de temps, à quel moment, et surtout comment les faire pour qu’ils servent vraiment à quelque chose.
Assouplissement ou étirement : ce qu’on vise vraiment
Avant de dérouler la routine, posons le cadre. Quand je parle d’« assouplissement », je parle de trois choses :
- La mobilité : votre capacité à bouger une articulation dans toute son amplitude utile (chevilles, hanches, genoux).
- La souplesse musculaire : la longueur fonctionnelle de vos muscles (ischios, quadriceps, mollets, adducteurs…).
- Le contrôle : êtes-vous capable d’aller dans cette amplitude sans vous crisper, en gardant de la stabilité ?
On ne cherche pas seulement à « tirer sur le muscle ». On cherche à apprendre au corps qu’il peut aller plus loin, en sécurité. C’est pour ça qu’on va combiner :
- Des mouvements dynamiques (avant séance ou à froid léger)
- Des étirements tenus (plutôt après séance ou sur une séance dédiée)
- Un peu de renforcement dans l’amplitude (pour que ces nouveaux degrés de liberté soient stables)
Routine d’assouplissement des jambes : le plan en 15 minutes
Je vais vous proposer une routine simple, que vous pouvez faire :
- Soit après un entraînement bas du corps
- Soit sur une journée « off » en mode récupération active
Temps total : environ 15 minutes.
Zones ciblées :
- Chevilles
- Mollets
- Ischio-jambiers (arrière des cuisses)
- Quadriceps (avant des cuisses)
- Adducteurs (intérieur des cuisses)
- Fessiers / hanches
Structure globale :
- 2–3 minutes de mobilité dynamique
- 10–12 minutes d’étirements tenus
- 1–2 minutes de retour au calme
Étape 1 : réveiller les articulations (mobilité dynamique)
Objectif : redonner du mouvement aux articulations avant d’aller chercher plus loin dans les étirements. Ça évite de « forcer » sur du froid et ça prépare le système nerveux.
1. Cercles de chevilles debout
Durée : 30 secondes par cheville
Comment faire :
- Debout, tenez-vous à un mur ou à une chaise si besoin
- Levez légèrement un pied et faites des cercles lents avec la cheville
- 10–15 cercles dans un sens, puis dans l’autre
À sentir : pas de douleur, juste une articulation qui se « dégrippe ».
2. Flexions de chevilles contre un mur
Durée : 1 minute (30 secondes par jambe)
Comment faire :
- Placez vos orteils à 5–10 cm d’un mur, pied à plat
- Avancez le genou vers le mur sans décoller le talon
- Reculez légèrement si le genou touche trop facilement, avancez si c’est trop dur
- Effectuez des allers-retours contrôlés
Cet exercice travaille la dorsiflexion de cheville, cruciale pour les squats, la course et la prévention des blessures au genou.
3. Bascule de hanches en fente
Durée : 1 minute (30 secondes par côté)
Comment faire :
- Mettez-vous en position de fente, genou arrière au sol
- Bassin légèrement rentré (comme si vous vouliez rapprocher le pubis de votre nombril)
- Balancez doucement le bassin vers l’avant puis revenez
On commence déjà à mobiliser le psoas et les fléchisseurs de hanche, sans forcer.
Étape 2 : les grands classiques… bien faits
Maintenant qu’on a « déverrouillé » un peu, on peut passer aux étirements tenus. Objectif : 30 à 45 secondes par position, 1 à 2 passages par côté.
1. Ischios – version simple au sol
Zone : arrière de la cuisse
Comment faire :
- Asseyez-vous au sol, une jambe tendue devant, l’autre pliée (pied contre la cuisse)
- Dos droit au départ, penchez-vous vers l’avant à partir des hanches, pas du dos
- Attrapez votre tibia, cheville ou pied (là où vous pouvez sans vous tordre)
- Tenez la position en respirant lentement
À éviter : arrondir le dos pour « gratter » 3 cm de plus. Ce n’est pas votre colonne qu’on veut étirer, mais l’arrière de la jambe.
2. Quadriceps – debout ou sur le côté
Zone : avant de la cuisse
Option debout :
- Debout, attrapez votre cheville derrière vous
- Genoux côte à côte, bassin légèrement rentré
- Tirez doucement le pied vers la fesse sans cambrer
Option au sol (plus stable) :
- Allongez-vous sur le côté
- Attrapez la cheville du dessus et ramenez-la vers la fesse
- Serrez légèrement les fessiers pour éviter d’exagérer la cambrure
3. Adducteurs – position du sumo
Zone : intérieur des cuisses
Comment faire :
- Pieds écartés plus large que les épaules, pointes légèrement ouvertes
- Descendez lentement en position de squat sumo (sans chercher la profondeur maximale)
- Posez vos avant-bras sur l’intérieur de vos genoux et poussez très légèrement vers l’extérieur
Si c’est trop intense, restez plus haut. L’idée n’est pas de souffrir, mais de trouver une tension supportable et stable.
4. Fessiers / piriforme – assis ou sur le dos
Zone : haut de la fesse, hanche
Option assise :
- Assis sur une chaise, posez la cheville droite sur le genou gauche
- Gardez le dos droit et inclinez légèrement le buste vers l’avant
Option au sol :
- Allongez-vous sur le dos, posez la cheville droite sur le genou gauche
- Attrapez l’arrière de la cuisse gauche et ramenez doucement vers vous
5. Mollets – version mur ou step
Zone : mollet, tendon d’Achille
Option mur :
- Pied avant à 20–30 cm du mur, pied arrière plus loin
- Talons au sol, poussez le bassin vers l’avant
- Vous devez sentir l’étirement dans le mollet arrière
Option marche / step :
- Montez sur une marche
- Placez l’avant du pied sur le bord, laissez le talon descendre doucement
Étape 3 : ancrer avec un peu de contrôle
Étendre une amplitude, c’est bien. Être capable de l’utiliser en mouvement, c’est mieux. On va donc ajouter un peu de contrôle actif, sans charge.
1. Montées de genoux lentes
Durée : 1 minute
Comment faire :
- Debout, posture droite
- Montez un genou à 90° (ou ce que vous pouvez), faites une pause d’une seconde
- Redescendez lentement et alternez
Objectif : activer les fléchisseurs de hanche dans l’amplitude que vous venez de libérer.
2. Squats contrôlés amplitude confortable
Durée : 1 à 2 minutes
Comment faire :
- Pieds largeur épaules, pointes légèrement ouvertes
- Descendez en squat jusqu’à une profondeur qui reste confortable pour vos genoux et votre dos
- Remontez en contrôlant, sans précipitation
On ne cherche pas la performance, mais la qualité : genoux dans l’axe, appuis stables, respiration fluide.
Combien de fois par semaine pour voir une vraie différence ?
Voilà un point qui fait souvent mal : la régularité. Une séance d’étirements « quand vous avez le temps » ne changera pas grand-chose. Par contre :
- 2 fois par semaine : vous stabilisez, vous faites du bien à vos articulations, vous limitez les tensions.
- 3 fois par semaine : vous commencez à sentir un vrai changement au bout de quelques semaines.
- 4 à 5 fois par semaine (même en format 10 minutes) : là, la mobilité se transforme réellement.
Ne pensez pas « grosse séance parfaite », pensez « petite routine réaliste que je peux tenir sur 3 mois ». Votre corps répond à ce que vous faites souvent, pas à ce que vous faites une fois avec héroïsme.
Avant ou après l’entraînement : à quel moment faire ces exercices ?
On me pose souvent cette question en coaching : « Je les fais quand, ces étirements ? »
Avant la séance (surtout si c’est une séance intense jambes) :
- Privilégiez la mobilité dynamique (articulations, mouvements actifs)
- Gardez les étirements tenus courts (10–20 secondes maximum) pour ne pas diminuer la production de force
Après la séance :
- C’est le bon moment pour les étirements tenus plus longs (30–45 secondes)
- Objectif : redonner de la longueur aux muscles, calmer le système nerveux
Jour off / le soir :
- Parfait pour un combo léger mobilité + étirements
- Idéal si vous êtes très raide ou si vous avez un travail sédentaire
Comment savoir si vous progressez réellement
Sans repère, on a vite l’impression de « faire des efforts pour rien ». Je vous conseille de vous créer 2 ou 3 tests simples, toujours les mêmes, à refaire toutes les 2 à 3 semaines.
Exemples de tests :
- Test d’ischios : debout, jambes tendues, penchez-vous vers l’avant et notez où arrivent vos doigts (milieu tibia, cheville, sol…).
- Test de cheville : genou contre mur, reculez le pied jusqu’au point où le genou peut toucher le mur sans décoller le talon, mesurez la distance.
- Test de squat confortable : descendez en squat sans forcer et observez à quelle profondeur vous pouvez aller sans douleur ni compensations majeures.
Notez vos repères sur votre téléphone ou carnet d’entraînement. Trois semaines plus tard, vous refaites la même chose. Si vous êtes sérieux avec la routine, les progrès se voient.
Les erreurs classiques qui sabotent l’assouplissement
Voyons quelques pièges que je retrouve tout le temps chez les sportifs (et chez certains coachs aussi, soyons honnêtes).
- Forcer dans la douleur
Si vous êtes à 8 sur 10 sur l’échelle de douleur, votre corps se crispe, se défend, et vous obtenez l’inverse de l’effet recherché. Cherchez un inconfort modéré, pas un supplice. - Bloquer la respiration
Si vous retenez votre souffle, vous signalez à votre système nerveux que la situation est menaçante. Résultat : tension. Règle simple : si vous ne pouvez pas respirer lentement dans la position, vous êtes allé trop loin. - Faire ça « à la va-vite »
8 secondes d’étirement entre deux gorgées d’eau, c’est du symbolique. Pour un changement réel, restez au minimum 30 secondes sur une position. - Ne jamais adapter
Votre corps n’est pas celui des vidéos YouTube. Utilisez des chaises, des coussins, une marche, diminuez l’amplitude. Un étirement adapté et tenable vaut 100 fois mieux qu’une posture « parfaite » insoutenable.
Cas particulier : si vous avez déjà mal aux genoux ou au bas du dos
Deux précautions importantes :
- Si la douleur est aiguë (récente, forte, lancinante) : consultez un professionnel de santé avant de forcer sur des étirements.
- Si la douleur est chronique (présente depuis des mois), intégrer cette routine peut aider, mais en respectant quelques règles.
Adaptations possibles :
- Privilégiez les positions allongées ou assises pour décharger la colonne.
- Réduisez l’amplitude sur les squats et les fentes : restez dans la zone sans douleur.
- Ajoutez du renforcement doux des fessiers (ponts de hanches), du tronc (gainage) et des muscles autour du genou.
Dans de nombreux cas, une meilleure mobilité des hanches et des chevilles soulage indirectement les genoux et le bas du dos, qui arrêteraient ainsi de « compenser » pour tout le monde.
Comment intégrer ça dans une vraie vie chargée
On va être honnêtes : vous avez sûrement autre chose à faire que 1h30 de mobilité par jour. Donc on va raisonner en minimum viable.
Quelques idées concrètes :
- Version express 8 minutes (les jours où vous êtes en retard) :
- 2 minutes : chevilles + fente dynamique
- 4 minutes : ischios, quadriceps, adducteurs (30 secondes par côté)
- 2 minutes : squats contrôlés + montées de genoux
- Version « transition de journée » :
- Vous rentrez du travail, avant de regarder un écran, 10 minutes de routine jambes
- C’est votre sas de décompression + entretien de mobilité
- Version « devant la télé » :
- Étirements ischios, fessiers, quadriceps au sol pendant une série ou un match
- Pas glamour, mais terriblement efficace si vous êtes régulier
L’idée est simple : au lieu de chercher du temps libre (qui n’arrivera pas par magie), vous « greffez » cette routine sur des moments qui existent déjà dans votre journée.
Et maintenant, qu’est-ce que vous faites de tout ça ?
Plutôt que de garder cet article comme une énième « bonne idée » dans un coin de votre tête, prenez 30 secondes maintenant et décidez :
- Quels 3 exercices vous allez intégrer (même si ce n’est pas toute la routine).
- À quel moment précis de la journée vous les ferez (ex : après la séance du mardi et du jeudi, ou tous les soirs avant la douche).
- Combien de semaines vous vous engagez à tester (au moins 3, pas moins).
Votre corps n’a pas besoin de promesses, il a besoin de répétitions. 10 minutes bien utilisées, 3 fois par semaine, pendant 1 mois, feront infiniment plus pour vos jambes que 45 minutes héroïques une fois par trimestre.
Choisissez votre version, notez-la quelque part, et la prochaine fois que vous sentez vos jambes raides ou que votre bas du dos proteste, rappelez-vous : vous avez une routine simple, concrète, prête à l’emploi. À vous de jouer.